Lokal est un concept-store incontournable à Helsinki. Fondé en 2012 par Katja Hagelstam, cet espace d’innovation – souvent référé comme LE lieu du design à Helsinki – est devenu depuis son ouverture, une véritable plateforme de découverte révélant les artistes et designers finlandais les plus prometteurs. Les différentes configurations proposées par les artistes apportent un renouveau permanent, faisant de ce lieu, une galerie en constante évolution. C’est dans une atmosphère chaleureuse et accueillante que les visiteurs peuvent venir découvrir différentes œuvres mais aussi d’autres produits artisanaux et en édition limitée. Pour l’exposition de réouverture de l’Institut finlandais, Katja Hagelstam a souhaité marquer les esprits avec « Juhlat » (la fête), une exposition imaginée spécialement pour cette occasion.

Vous avez ouvert Lokal en 2012. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce qui se trouve derrière cet espace : qu’est-ce qui vous a inspiré pour son ouverture ? Quels ont été les changements et les évolutions au cours des dernières années ?

Je n’ai jamais vraiment rêvé ou pensé à ouvrir un espace. Avant d’ouvrir Lokal, j’avais travaillé sur un livre intitulé 20+12, avec Piëtke Visser. À l’époque, Helsinki avait été nommée « Capitale du design 2012 ». C’est aussi pour cette raison que nous avons voulu créer un livre qui se concentrerait sur Helsinki et qui mettrait en avant des images et des vues de la ville. Pour ce livre, j’avais photographié plusieurs designers, leur appartement, leur atelier, mais aussi des paysages d’Helsinki. C’est après cela que j’ai eu l’idée de transformer ces photographies et œuvres en une exposition de photos. Je suis tombée par hasard sur un espace vide dans le centre-ville d’Helsinki et je m’en suis inspirée. J’ai réfléchi, et j’ai rapidement pris la décision d’ouvrir mon propre espace.

Pour des raisons pratiques comme la demande d’un contrat de location de trois ans par exemple, j’ai dû faire quelques choix déterminants. Au lieu d’un pop-up store, j’ai préféré investir dans quelque chose de plus permanent. Jusqu’à cette époque-là, j’avais travaillé comme photographe freelance et je n’avais jamais géré un espace ou une galerie. J’avais beaucoup photographié du design et de l’art, des intérieurs et de la gastronomie. Grâce à cette pratique, j’avais l’habitude de mettre en place différents univers à travers mon objectif. J’avais réussi à développer ma vision des choses à travers la pratique de la photographie.

Dès le début, les expositions proposaient une ambiance conviviale, mêlant meubles modernes et anciens. Lorsque je travaillais sur les expositions, je pensais les choses comme si j’étais en train de construire des images en trois dimensions. Nous souhaitions que le visiteur puisse découvrir l’art dans un espace semblable à un lieu de vie, une maison avec un esprit convivial tout en laissant bien sûr, de la place pour l’imaginaire. Souvent, les gens ont du mal à entrer dans les galeries white cube. J’ai donc voulu créer un environnement plus chaleureux, plus accueillant. Maintenant, après six ans et plus de 50 expositions, Lokal continue de fonctionner sur le même principe.


Quelle est l’idée derrière le nom Lokal ?

J’ai réfléchi au nom pendant très longtemps. Lokal signifie « local » en suédois et en anglais (mal écrit, certes), mais aussi « espace » et « appartement ». Un espace local. J’ai toujours voulu montrer le travail des artistes locaux et c’est aujourd’hui encore très important pour moi de travailler avec les artistes locaux. Lokal vit et se transforme à chaque exposition et le concept est devenu plus clair au fil du temps. Au début, je voulais que tout soit en vente dans ces expositions, des tasses à café aux serviettes. J’ai aussi pensé que le café jouerait un rôle important dans cet espace mais j’ai vite compris qu’il ne serait pas possible de tout faire en même temps.

Lokal est connu pour servir de tremplin aux jeunes designers et artistes. Quel est votre secret pour découvrir de nouveaux talents ?

Le processus n’est pas vraiment systématique, il est très rare que j’aille chercher des gens moi-même. Souvent, quelqu’un me recommande une personne ou bien, un artiste vient tout simplement me présenter ses œuvres lui-même.

Nous organisons environ huit expositions par an donc le rythme est assez soutenu. Avant, nous organisions la plupart du temps des expositions avec une vingtaine d’artistes alors qu’aujourd’hui, une exposition sur deux propose des collaborations entre quelques artistes.

Je crois que la tendance actuelle se dirige vers l’élimination des choses et des objets dont nous n’avons plus besoin.

Comment décririez-vous la créativité actuelle en Finlande et à Helsinki ? Quels changements ont eu lieu ces dernières années ? Que souhaiteriez pour l’avenir ?

L’année 2012 a été une période assez importante pour le paysage urbain d’Helsinki. De nouveaux projets sont apparus et nous avons pu observer l’émergence d’une nouvelle énergie : les saunas, les restaurants days… Beaucoup de petites initiatives issues de la communauté locale. Ce moment a marqué un tournant dans l’histoire du design finlandais mais a aussi initié un mouvement de libération de la scène artistique.

Quelles sont les caractéristiques que vous appréciez chez un designer ou dans une œuvre ?

Sentir et voir que le produit est fait d’une manière artisanale est important pour moi. Bien sûr, il est important que le produit fonctionne bien et soit pratique. Je crois que la tendance actuelle se dirige vers l’élimination des choses et des objets dont nous n’avons plus besoin. La qualité des pièces va gagner en importance, s’améliorer. En ce qui concerne les matériaux, je n’ai pas vraiment de préférences.

Chez un designer, la curiosité et le courage sont des caractéristiques indispensables, tout comme la compréhension des traditions. Nous n’avons pas besoin de tout réinventer. J’aime beaucoup les choses traditionnelles comme lorsqu’un jeune designer fait une version « actualisée » avec une ancienne technique.


Avec Lokal, vous venez de participer à une foire d’art et de design Chart à Copenhague, du 31 août au 2 septembre. Comment cela s’est-il passé ?

Nous avons présenté une exposition avec 12 artistes et designers. C’était la première fois pour nous dans une foire, ce qui a été particulièrement enrichissant. Nous avons respecté le concept habituel de Lokal : une exposition de groupes avec des rencontres et des situations intéressantes. À travers notre sélection, nous avons mis en valeur les matériaux et la convivialité. L’ensemble se trouvait entre le design et les arts plastiques. Renata Jakowleff, Inka Kivalo et Outi Martikainen étaient parmi les artistes exposés : des artistes créatifs, courageux, curieux et avec des convictions.

Qu’est-ce qui est prévu pour la rentrée de Lokal ?

Le programme de l’automne est passionnant, avec beaucoup de combinaisons différentes. L’exposition sur les jeunes artistes, actuellement visible à la galerie, continue encore pendant un mois. Après cela, nous exposerons le travail de Matias Liimatainen et Sanna Lehto, proposant une rencontre entre la photographie et la céramique. J’ai déjà travaillé avec eux dans le passé : je trouve que leurs travaux respectifs comportent beaucoup de similarités. Les deux artistes se complètent l’un l’autre.

Lokal

Portrait de Katja par Ananya Tanttu
Photographies par Katja Hagelstam