Tous les mois, l’Institut finlandais met en lumière des personnes dont le travail marque la Finlande et la France d’aujourd’hui. Au mois de janvier, nous avons partagé un moment avec Antrei Hartikainen, un jeune ébéniste et designer, qui vit et travaille au village de Fiskars en Finlande, où il se consacre au travail artisanal du bois. Du 10 janvier au 13 avril 2019, l’Institut finlandais propose une exposition monographique à Antrei Hartikainen, le lauréat 2018 du prix du Jeune designer de l’année décerné par Design Forum Finland.

Pourriez-vous nous raconter un peu votre parcours ? Comment avez-vous découvert l’univers de la charpenterie, de l’ébénisterie et du design de meubles ?

Depuis tout jeune, j’ai toujours été intéressé par le fait de travailler avec mes mains. J’ai aidé mon père dans son atelier de menuiserie et pendant mon temps libre, je pouvais également y fabriquer de petits objets pour moi-même. Plus tard, j’y ai travaillé en tant que saisonnier. Cette expérience m’a conduite vers des études “d’artisan du bois” où j’ai appris les bases du design. Voilà comment j’ai découvert le métier d’ébéniste et de créateur. Depuis 2010, j’habite et travaille à Fiskars, un petit village au sud de la Finlande connu pour ses communautés d’artisans, de designers et d’artistes.

Comment caractérisez-vous votre “philosophie du design” ?

Je souhaite créer des objets durables et rester fidèle au processus de design et de production. C’est possible lorsque l’on est attentif à l’utilisation des matériaux, aux techniques, au moindre petit détail. Je voudrais que les gens qui voient mon travail soient inspirés par cette utilisation des matériaux, par la qualité du savoir-faire, la finition et par l’esthétique elle-même.

Comment c’était de travailler sur l’exposition Carte Blanche de l’institut finlandais?

C’était une occasion formidable de montrer la variété de mes pièces : meubles, sculptures, le mélange avec le verre et d’autres petit objets. J’ai également créé de tout nouveaux objets pour cette exposition.

Vous collaborez souvent avec d’autres artistes, designers et fabricants. Quelle serait la collaboration idéale pour vous, et avec qui ?

Je ne pourrais pas en mentionner une seule, il y en a trop. En tout cas, le rêve serait de travailler avec un groupe de créateurs où chacun apporterait son propre savoir-faire sur un matériau différent. En collaboration, on pourrait créer une petite série de meubles et objets dont les matériaux et chaque détail auraient été soigneusement sélectionnés.

Photo: Antrei Hartikainen

Pourriez-vous nous parler de votre collaboration avec Katriina Nuutinen et de la collection de verres « Vieno » que vous avez créée ensemble qui fait également partie de l’exposition Carte Blanche à l’Institut ?

La collaboration avec Katriina a été très facile et agréable. Nous sommes tous les deux originaires de la Carélie du Nord donc nous partageons le même esprit. Notre collaboration a pris forme d’une manière organique, sans forcer quoi que ce soit. Cela se voit dans les produits finis où le verre et le bois vont parfaitement ensemble. La série de bouteilles “Vieno” est faite de verre soufflé de différentes couleurs et de bois sculpté à la main. Chaque pièce est unique. Le travail du bois et la finition de surface sont fait d’une telle manière que cela crée une illusion du matériau. C’est seulement en étudiant les objets de plus près qu’on peut voir que c’est du bois.

Quel type de bois préférez-vous utiliser ? Y a-t-il d’autres matériaux que vous aimeriez explorer dans le futur ?

Le choix du type de bois dépend toujours des besoins pour le produit fini. J’aime bien utiliser du bois de tilleul quand je fais des sculptures parce que c’est très agréable à travailler. En revanche, je n’utiliserai jamais le tilleul pour fabriquer des meubles durables. Toutes les essences de bois ont leurs forces et leurs faiblesses : esthétique, durabilité, maniabilité, caractère écologique etc. Il faut juste choisir la plus appropriée pour chaque projet. Le plus souvent, j’utilise l’érable, le noyer, le tilleul, le chêne et le frêne. Dans le futur, j’aimerais également travailler la céramique ou le verre.

Je repère les différentes formes et les objets intéressants dans l’architecture, la nature et dans notre environnement quotidien.

Comment décririez-vous votre journée idéale ? Où trouvez-vous votre inspiration ?

Visiter des usines intéressantes. Je suis fasciné par les différents processus, les techniques pour fabriquer les pièces à la machine, à la main ou en combinant les deux méthodes. Je trouve mon inspiration dans mon environnement, là où je peux observer et admirer ce qui m’entoure. Je repère les différentes formes et les objets intéressants dans l’architecture, la nature et dans notre environnement quotidien. Les jeux de lumière et d’ombres sur les surfaces m’inspirent aussi.

Dans votre travail, vous combinez la charpenterie traditionnelle et la menuiserie finlandaise avec le design contemporain. On dit souvent que vos oeuvres oscillent entre l’art et la fonctionnalité. Est-ce que vous pensez qu’il faut parfois faire des compromis entre esthétique et fonctionnalité ?

Je trouve qu’il s’agit toujours de faire des compromis. En fin de compte, c’est cela qui améliore le travail. Pour moi, ce n’est pas quelque chose de négatif parce que j’aime bien faire cela. De cette manière, je peux à la fois créer des produits uniques et artistiques mais aussi des sculptures fonctionnelles.

Photo: Antrei Hartikainen
Photo: Kari Nyyssönen

Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur vos projets pour 2019 ?

Pour en mentionner quelques-uns, je continuerai à travailler avec Nikari, Poiat et aussi quelques nouvelles marques. Au cours de 2019, la galerie Lokal à Helsinki présentera quelques-unes de mes pièces, des récentes comme des plus anciennes. Au village de Fiskars, il y aura également cet été une grande exposition « TEHDAS / FABRIK / FACTORY » pour laquelle je vais créer une nouvelle installation lumineuse sculptée. En 2019, il y aura également dans le même village, l’événement Fiskars Art & Design Biennale, pour lequel je vais créer une grande installation en bois en collaboration avec une équipe d’architectes et de menuisiers. De plus, je continue la création et la fabrication de nouveaux objets et vais assister à de nombreuses expositions autour du monde.

En parallèle de l’exposition Carte Blanche, votre visite de janvier marquera également le début d’un nouveau programme de visite de l’Institut finlandais : IF Studios. Comment comptez-vous occuper votre temps pendant cette période ?

Je vais profiter de l’ambiance parisienne, c’est sûr. Je pense également visiter des galeries, des musées et d’autres lieux relatifs au design. Je contacterai aussi de nouvelles personnes et j’essaierai de me concentrer sur mes nouveaux designs tout en planifiant un peu plus mon année 2019.

Antrei Hartikainen